Depuis l’Après-guerre surtout, la communication est devenue un objet d’étude important en sociologie. Les médias dits « de masse » ayant connu une expansion fulgurante à partir de cette période en tant que moyens privilégiés de diffusion des informations dans la société, ils ont été étudiés systématiquement : sociologie du travail des journalistes dans les salles de rédaction ou les agences de presse, analyse des contenus des messages véhiculés par la presse et les médias (information, propagande, publicité), étude des audiences et des publics, évaluation des effets des médias sur les individus et les groupes sociaux à court et à long terme, analyse comparée des supports et des médias, etc. Au fil des ans, des débats importants ont vu le jour au sein de la communauté des chercheurs, notamment en ce qui concerne l’influence sociale des médias (ces moyens de diffusion n’auraient-ils que des « effets limités » ou constituent-ils au contraire un « quatrième pouvoir » ?), la concentration financière et économique des entreprises de presse, la fonction d’agenda politique exercé par les médias, etc.
À partir des années soixante-dix, de nouvelles pratiques de diffusion et de communication virent le jour, favorisées par le développement de technologies d’information et de communication comme la vidéo portable, la distribution des signaux par câbles coaxiaux et la diffusion par satellites. Pensons à l’accroissement du rythme des diffusions d’émissions de télévision à l’échelle planétaire mais aussi à l’émergence des premiers médias dits « communautaires », aux pratiques d’intervention et d’expérimentation sociales avec la vidéo, aux premières pratiques artistiques intégrant les médias audio-visuels, etc. En même temps, une pensée critique s’affirmait de manière plus marquante : critique de l’action idéologique des médias et de la massification, analyse du développement contradictoire des industries culturelles et des transformations des espaces publics, analyse des conditions et conséquences de l’internationalisation des systèmes de communication, etc. Simultanément, de nouveaux champs de recherche se sont ouverts: les paradigmes d’étude des contenus et des effets se sont orientés vers une prise en compte des problématiques de la réception différenciée des messages selon les appartenances de classes, de genres ou de groupes ethniques des membres des publics.
Les temps présents font apparaître la communication comme un véritable enjeu culturel, économique et politique pour le développement des sociétés. Un grand nombre de pratiques de communication au sein des organisations (entreprises privées, agences gouvernementales, organismes internationaux) se sont institutionnalisées. Les activités des entreprises économiques à l’échelle locale, nationale ou transnationale, comme celles des groupes sociaux ou politiques ou des militaires ne peuvent se faire aujourd’hui sans prendre en compte et recourir systématiquement à des perspectives et pratiques de communication dans l’élaboration des stratégies d’action. On assiste depuis deux décennies, à une explosion des moyens techniques de diffusion et de communication fondée sur les avancées de la numérisation des signaux qui permet une convergence entre les domaines de l’informatique, des télécommunications, de l’audio-visuel et du multimédia. Simultanément, la mise en réseaux des systèmes de communication à l’échelle planétaire induit une intégration nouvelle des pratiques de diffusion et de communication qui fait émerger de nouvelles questions de recherche concernant aussi bien le contrôle et la concentration des nouvelles entreprises industrielles transnationales, les transformations des pratiques, des contenus et des supports multimédias, les rapports entre l’oral, le visuel et l’écrit dans ces environnements numérisés, que les usages sociaux de ces techniques.
Le CR33 « Sociologie de la communication et du numérique » se propose de rendre compte de la façon dont la sociologie actuelle aborde ce vaste champ d’étude, et se donne pour but d’encourager rencontres et échanges entre sociologues d’expression française travaillant sur ce thème.